Toi qui regardes sans voir
Sais-tu voir plus loin ?
Toi qui regardes sans voir
Toi qui parles sans savoir
Ton esprit glisse sur les apparences
Tu vois un sourire et tu crois à la vie derrière
Tu vois un corps debout et tu crois à sa force
Tu entends des mots et tu les crois authentiques, cohérents,
Comme s’ils collaient au réel du monde
Tu ne vois pas les tiroirs à doubles fonds,
Ni l’invisible décors derrière le rideau rouge
Refermé sur la scène où se déroule l’histoire
La seule que tu peux accepter de voir
Une histoire unique, fragmentée, éclatée,
Dont tu ne vois qu’un morceau,
Celui que ta propre vie est capable de supporter.
A force de rester du côté des apparences
Tu ne connais ni le visage de la rage
Ni le visage de la mort
Qui est la sœur jumelle de la souffrance
Elle gangrène les tissus jusqu’au cœur
Elle avance plus rapidement que tu ne crois
Et quand elle est passée sur le corps de quelqu’un
Tu es sonné,
Tu n’as rien vu, rien compris…
Mais pourtant hier…
Mais pourtant elle semblait si…
Mais pourtant tout avait l’air si normal...
Il y a un espace aussi fin qu’un cheveu
Entre la vie et la mort
La mort ressemble parfois à la vie
La vie parfois n’est qu’une mort annoncée
Sache que ta bienséance t’aveugle
Sache que ta souffrance non rencontrée
Te rend insensible et indélicat,
Aveugle aux drames qui se préparent.
Tes paroles suaves qui se croient spirituelles
Ne sont que violence, déni et orgueil
Tu veux la lumière,
Alors personne ne doit souffrir sur ta route
De peur d’assombrir ton chemin
Personne ne doit hurler, vociférer, cracher ses démons
De peur que tu ne vois les tiens en pleine lumière.
Mais je t’emmerde à chaque fois qu’il faut être poli,
A chaque fois que tu veux la paix,
A chaque fois que tu refoules la colère d’un autre
Et que tu lui ôtes une chance de revivre,
Je t’emmerde à chaque fois qu’il faut faire semblant
Et que tu nous enfermes toi et moi dans les mensonges,
A chaque fois qu’il faut rester dans le cadre
Et ne pas faire de vagues au moment des grandes marées,
Ne pas dire de vilains mots pour garder la face
Et faire joli.
Le joli fait une belle jambe aux anges…
Qui n’en ont pas.
Ils s’en foutent de tes mots policés, de ta mèche bien lissée
Ce qu’ils veulent, c’est ta chair, ton sang et tes cris
Ta crinière hérissée
Te voir entrer dans le feu de la vie
Même si la vie et la mort sont si intimes
Que tu ne sais plus dans quel monde tu es.
Louve